En ma qualité de député national, je me vois dans l’obligation d’interpeller Madame la Gouverneure de la Banque Centrale du Congo (BCC) à travers une démarche officielle que je déposerai ce lundi 26 mai 2025 auprès du Bureau de l’Assemblée Nationale.
Je suis profondément alarmé par une violation manifeste de la loi n° 22-069 (loi bancaire), perpétrée via l’Instruction n° 18 (modif. 3, juillet 2023), qui met en lumière une dérive préoccupante dans la régulation bancaire.
Cette instruction, dans son article 62, prolonge illégalement à trois (3) ans un délai de conformité fixé à six mois par l’article 190 de la loi bancaire pour la dilution obligatoire du capital social des établissements de crédit.
Cette exigence impose à ces derniers de répartir leur capital entre au moins quatre actionnaires significatifs, chacun détenant un minimum de 15 %. Or, ce délai légal a expiré dès juillet 2023, plongeant les établissements de crédit dans une illégalité prolongée.
Cette obligation de dilution est une mesure atypique et contre-productive que la RDC est le seul pays africain à avoir instaurée. Elle perturbe le modèle économique des banques existantes, complique l’entrée de nouveaux acteurs et fragilise la compétitivité du secteur. La BCC, qui a elle-même initié cette mesure dans le projet de loi bancaire, semble avoir tardivement pris conscience de son caractère inadapté.
Mais au lieu de solliciter le Parlement pour une modification légale, comme l’exige la Constitution, elle a choisi de contourner la loi par un simple acte réglementaire via cette instruction. Une telle démarche est non seulement illégale, mais elle constitue une atteinte directe aux prérogatives exclusives de l’Assemblée Nationale et du Sénat, seuls habilités à légiférer.
Je tiens à préciser que cette tentative de contournement a été découverte dans le cadre de nos travaux sur une proposition de loi, déposée en septembre 2024 et actuellement en examen à l’Assemblée Nationale.
Ce texte vise à réformer les conditions d’agrément des établissements de crédit, notamment cette obligation de dilution, afin de les rendre plus adaptées au contexte économique congolais.
Si la BCC avait choisi de collaborer avec le Parlement, ce problème d’illégalité aurait pu être évité. Je tends d’ailleurs la main à la BCC : en cas d’adoption de ma proposition de loi, nous pourrions ensemble rectifier les erreurs de cette loi bancaire, pourvu qu’elle s’engage dans une démarche transparente et respectueuse des institutions.
Sans une telle collaboration, les conséquences sont graves. Les dirigeants de la BCC, à savoir la Gouverneure et les membres de son Comité de Direction, s’exposent à des sanctions pour abus de pouvoir, ainsi qu’à l’annulation de l’instruction par les juridictions compétentes. Quant aux établissements de crédit, ils se retrouvent dans une insécurité juridique majeure : bien que la BCC leur ait accordé un délai illégal, ils demeurent non-conformes à l’exigence légale de dilution et risquent des sanctions administratives et pécuniaires exorbitantes, qui pourraient fragiliser davantage un secteur déjà sous tension.
Je ne peux me résoudre à voir une institution aussi essentielle que la BCC perdre sa crédibilité en défiant ainsi la loi qu’elle est censée faire respecter. Cette situation est un précédent fâcheux qui ébranle la confiance dans notre système de régulation bancaire.
Je reste convaincu que la BCC peut encore corriger cette erreur, mais le temps presse. Cette interpellation est un appel urgent à rétablir la légalité et à préserver l’intégrité de nos institutions démocratiques.
Katuala