l’Assemblée nationale de la RDC a opposé un refus clair à la demande d’autorisation de poursuite introduite par le Parquet général près la Cour de cassation à l’encontre de l’ancien ministre des Finances et actuel député national, Nicolas Kazadi.
Une décision qui, bien que constitutionnelle, alimente de nombreuses interrogations politiques, judiciaires et citoyennes.
Un refus qui freine la machine judiciaire, mais ne l’arrête pas
En vertu de l’article 107 de la Constitution, un député national ne peut être poursuivi, arrêté ou jugé sans autorisation de l’Assemblée nationale. Le refus de cette autorisation bloque donc toute procédure judiciaire immédiate. Le parquet n’a désormais plus d’option que d’attendre la fin du mandat de l’intéressé, sauf en cas de faits nouveaux ou de flagrance, ce qui ne semble pas être le cas ici.
Mais ce refus ne signifie pas l’innocence de M. Kazadi, encore moins l’abandon du dossier. Il s’agit d’un frein institutionnel qui souligne une tension persistante entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif en RDC. Le principe d’immunité parlementaire, souvent perçu comme un bouclier contre l’arbitraire, devient ici aux yeux de nombreux citoyens, un refuge politique contre la justice.
Une Assemblée nationale face à ses responsabilités historiques
Ce vote pose un véritable défi d’image pour l’Assemblée nationale. Elle apparaît pour certains comme un rempart corporatiste, protégeant ses membres au détriment de la transparence et de la lutte contre la corruption. Pour d’autres, elle a simplement exercé son droit constitutionnel d’empêcher des poursuites qu’elle juge politiquement motivées ou insuffisamment étayées.
Il est donc essentiel que cette institution explique clairement les motivations du refus, pour gagner la confiance de l’opinion publique et éviter que ce vote ne soit perçu comme un simple mécanisme d’impunité.
⚖️ Et maintenant ? Quelle suite judiciaire ?
Le Parquet général dispose encore de plusieurs leviers juridiques :
1. Classer le dossier provisoirement tout en conservant les éléments à charge.
2. Revenir avec une nouvelle demande de poursuite si des éléments supplémentaires apparaissent.
3. Attendre la fin du mandat parlementaire de Nicolas Kazadi pour relancer la procédure, car à ce moment, l’immunité tombe automatiquement.
Il convient aussi de noter que la pression citoyenne et médiatique peut jouer un rôle important pour que la vérité soit établie, quelle qu’elle soit.
Conclusion : Une République à la croisée des chemins
Le cas Kazadi n’est pas uniquement un dossier judiciaire : il est le révélateur d’un enjeu profond de gouvernance. Le peuple congolais aspire à un État de droit où la justice est indépendante, où les institutions coopèrent dans le respect de leurs prérogatives, et où nul n’est au-dessus de la loi, même pas un député.
Le refus d’autorisation de poursuite ne doit pas devenir une habitude institutionnelle, mais une exception rigoureusement justifiée. Le contraire signerait le recul de l’État de droit.
Graddy Oloko
Analyste politique – Kinshasa