L’élection de la République Démocratique du Congo à la vice-présidence de la 79ᵉ session de l’Assemblée générale des Nations unies est un signal fort.
Elle témoigne de la reconnaissance croissante, sur le plan international, du rôle moteur que la RDC est appelée à jouer dans la gouvernance mondiale.
Cette avancée n’est pas un accident diplomatique. Elle est le fruit d’un repositionnement stratégique engagé depuis 2019 par le président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, qui a redonné souffle, stature et ambition à la diplomatie congolaise.
Mais cette élection intervient dans un contexte intérieur grave, qui ne peut être occulté : celui d’une crise humanitaire et sécuritaire d’une ampleur dramatique à l’Est du pays. Des zones comme *Goma, Beni, Bunia, Rutshuru, Bukavu, Kalehe, Minembwe, Uvira, Masisi et bien d’autres* vivent depuis trop longtemps dans l’angoisse du lendemain. Les populations y subissent les atrocités de groupes armés, les déplacements massifs, les violences sexuelles, les pillages et l’indifférence généralisée.
Dans ce climat de douleur et de défiance, cette vice-présidence à l’ONU suscite une question légitime : *est-ce une opportunité stratégique à saisir pour influencer l’agenda mondial et ramener la paix ?* *Ou est-ce un défi risqué, qui pourrait révéler les faiblesses internes si cette chance n’est pas transformée en actions concrètes ?*
La réalité, c’est que c’est les *deux à la fois* .
*C’est une opportunité historique* parce que la RDC a désormais une place officielle dans la plus haute enceinte diplomatique du monde. Une tribune pour alerter, dénoncer, mobiliser. Pour poser sur la table du Conseil de sécurité la situation de l’Est, non comme une crise secondaire, mais comme le drame géopolitique majeur de l’Afrique centrale au XXIᵉ siècle. C’est aussi un levier pour exiger des réponses plus fermes, des actions coordonnées, et une réforme profonde de l’approche onusienne face aux conflits prolongés.
Mais c’est aussi un défi de gouvernance et de cohérence, car cette visibilité nous engage. La communauté internationale attend désormais des résultats visibles sur le terrain : une armée mieux structurée, une diplomatie régionale proactive, une mobilisation du leadership africain, et surtout, une volonté politique constante de replacer les populations au centre des priorités.
Le gouvernement, sous la conduite du président Tshisekedi, en est conscient. Il a déjà engagé plusieurs fronts : renforcement de la diplomatie de proximité avec les voisins, participation active aux mécanismes de la CIRGL et de la SADC, pression continue sur l’Union africaine pour une réponse continentale, et réforme progressive des forces de défense.
Dans cette dynamique, la souffrance des Congolais de l’Est ne peut pas être banalisée. Chaque famille déplacée à Kalehe, chaque veuve de Minembwe, chaque orphelin de Bunia, chaque enfant sans école à Bukavu doit devenir le cœur même de notre action diplomatique. Ce mandat à l’ONU doit servir à parler en leur nom, à faire entendre leur détresse, à exiger justice, sécurité et avenir.
Sur le plan africain, cette nomination représente aussi une responsabilité collective. L’Afrique ne peut pas se désintéresser du sort de la RDC. Elle doit reconnaître que la déstabilisation de l’Est est une menace pour l’ensemble du continent. C’est l’occasion de construire une réponse panafricaine, souveraine, ferme, face aux ingérences et aux logiques de prédation.
L’élection de la RDC à la vice-présidence de l’ONU marque donc un tournant historique : un moment de vérité entre notre ambition internationale et nos urgences nationales. À nous, maintenant, d’en faire un levier d’action. Pas simplement pour occuper un siège, mais pour défendre une cause. Pas seulement pour parler au monde, mais pour répondre à l’appel de *Bukavu, Minembwe, Kalehe, Beni, Bunia, Goma, Uvira, Masisi…* qui crient, chaque jour, pour la paix.
Un Éditorial proposé par Monsieur Christian SAFARI BAGANDA, analyste politique et Éditorialiste.
La Rédaction