Au fil des audiences du procès de Joseph Kabila devant la Haute Cour militaire de Kinshasa, un membre du collectif d’avocats mandatés par la République a affirmé que l’ancien président congolais détiendrait une fortune « supérieure à 32 milliards de dollars ».
Cette estimation si elle était avérée dépasserait largement le budget national 2025, initialement chiffré à environ 18,4 milliards USD (51 553 milliards CDF) avant rectificatif. Pour l’heure, aucun document judiciaire rendu public ni aucune enquête indépendante reconnue n’étayent cette somme.
Où en est le dossier judiciaire ?
Le dossier Kabila a franchi un cap institutionnel en mai 2025, quand le Sénat a levé son immunité, ouvrant la voie aux poursuites.
Le 25 juillet 2025, un procès in absentia s’est ouvert à Kinshasa, sur une série de charges lourdes, dont haute trahison, crimes contre la paix et soutien présumé à la rébellion M23/AFC. L’ex-chef de l’État rejette ces accusations et dénonce un dossier politique.
Des honoraires d’avocats qui alimentent la polémique
En marge de ces audiences, le montant des honoraires des avocats de la République moins de 3 millions USD répartis entre plusieurs cabinets selon les intéressés a suscité de vifs débats publics.
Les avocats affirment que l’ampleur, les risques et la sensibilité du dossier justifient cette enveloppe, tandis que d’autres dénoncent une dépense excessive.
Que sait-on des avoirs de Joseph Kabila ?
Plusieurs enquêtes antérieures ont documenté des intérêts économiques liés à Joseph Kabila et à des membres de sa famille, mais aucune source sérieuse n’a jamais établi un patrimoine de l’ordre de “32 milliards USD” :
En 2017, le Congo Research Group a cartographié un vaste réseau d’entreprises liées à la famille Kabila, évoquant des « millions » de dollars de revenus, sans chiffrer un total approchant des dizaines de milliards.
Reuters parlait de participations « probablement de l’ordre de dizaines de millions ».
En 2021, l’investigation “Congo Hold-up” a retracé des flux financiers suspects liés à l’entourage de l’ex-président (environ 138 millions USD détournés selon le consortium), sans établir un cumul patrimonial à plusieurs dizaines de milliards.
D’autres rapports (The Sentry) ont décrit des circuits d’argent illicite de l’ordre de centaines de millions, là encore très loin des 32 milliards avancés.
À l’inverse, la communication de la défense de Joseph Kabila a déjà revendiqué par le passé qu’il avait laissé près de 2 milliards USD à la Banque centrale à la fin de son mandat — un chiffre contesté par de nombreux observateurs.
Une assertion spectaculaire, mais non corroborée
L’estimation à 32 milliards USD circule surtout sur les réseaux sociaux et certaines vidéos, sans dépôt de pièces probantes dans le domaine public.
En l’absence de déclarations d’avoirs officielles, d’expertises judiciaires versées au dossier ou d’enquêtes financières internationales pointant un tel niveau de richesse, cette somme doit être considérée comme une allégation, pas comme un fait établi.
À ce stade, aucune source indépendante et crédible ne confirme ce montant.
Enjeux politiques et économiques
Si la justice devait, au terme de la procédure, retenir la responsabilité de Joseph Kabila et ordonner des réparations, l’État congolais chercherait à récupérer des actifs potentiellement évalués à des milliards de dollars, ont indiqué des avocats de la partie civile.
Mais là encore, l’ordre de grandeur exact dépendra des preuves que la République parviendra à verser et à faire valider par le tribunal (traçabilité des sociétés, comptes, biens immobiliers, participations minières, etc.).
Comparaison avec le budget 2025
Pour mesurer l’ampleur de la prétention à 32 milliards USD, il suffit de rappeler que la loi de finances 2025 de la RDC est autour de 18 milliards USD (51 553 milliards CDF), ramenés à environ 50–51 000 milliards CDF dans la rectificative promulguée fin juin.
Affirmer que la fortune d’un individu dépasse le budget de l’État est donc politiquement frappant, mais juridiquement cela exige des preuves d’une rare solidité.
Le procès est en cours depuis le 25 juillet 2025 ; Kabila dément toutes les charges.
Un avocat de l’État a évoqué “plus de 32 milliards USD”, sans preuve publique à ce jour.
Les enquêtes indépendantes disponibles documentent des intérêts et des flux à hauteur de millions à centaines de millions, pas des dizaines de milliards.
Le budget 2025 de la RDC tourne autour de 18 milliards USD (initial), rectifié fin juin.
Pour Zionnews-tv.net / Jason Kabera