Le projet « Zéro Trou », lancé en grande pompe par le vice-gouverneur du Kasaï-Central, Job Kuyidama Kandende, promettait de révolutionner l’état des routes de Kananga.
Pourtant, plusieurs mois après son annonce, la ville reste prisonnière de ses chaussées impraticables, transformées en bourbiers à chaque averse. Ce projet, qui devait incarner une réponse concrète aux souffrances des habitants, ressemble désormais à une mise en scène cinématographique sans impact réel sur le terrain.
Dès le départ, le lancement de « Zéro Trou » a suscité des interrogations. Aucun plan détaillé n’a été rendu public, aucun budget transparent n’a été dévoilé, et les entreprises censées exécuter les travaux n’ont jamais été présentées aux citoyens. La mise en scène d’un projet sans matérialisation sur le terrain traduit une stratégie politique où la communication supplante l’action. Les citoyens de Kananga, las des promesses non tenues, observent avec amertume l’écart entre les annonces officielles et la réalité.
Les artères principales de la ville demeurent des pièges pour les automobilistes et les piétons. L’avenue Lumumba, le boulevard de l’Indépendance et d’autres axes stratégiques se transforment en lacs artificiels après chaque pluie. À ce stade, le projet « Zéro Trou » semble davantage être un slogan politique qu’une véritable initiative de développement. L’absence de travaux visibles alimente la frustration et le scepticisme d’une population qui aspire à des solutions durables.
La critique majeure de cette initiative réside dans son manque de réalisme. Dans une ville où l’entretien routier est quasi inexistant, prétendre atteindre un « zéro trou » sans moyens adéquats relève de la pure illusion. Le gouvernement provincial aurait dû commencer par un état des lieux technique, un plan d’action chiffré et un calendrier des travaux.
L’absence de ces éléments fondamentaux montre que l’opération a été précipitée, probablement pour des gains politiques immédiats.
Les autorités doivent comprendre que la population n’est plus dupe. Le développement ne se décrète pas à coups de discours, mais se concrétise par des actions palpables. Pour redonner de la crédibilité à ce projet, il serait nécessaire de revoir entièrement la stratégie.
Un engagement réel passerait par la mobilisation de ressources, la transparence dans la gestion des fonds et l’implication d’experts en infrastructures pour garantir des solutions adaptées aux défis climatiques et géographiques de Kananga.
L’une des premières initiatives à entreprendre serait de recourir à un partenariat public-privé pour financer la réhabilitation des routes.
De nombreuses villes africaines ont adopté ce modèle, permettant ainsi une meilleure gestion des infrastructures avec un suivi rigoureux des travaux.
L’implication des entrepreneurs locaux garantirait également une exécution plus efficace, loin des grandes promesses politiques sans lendemain.
Une autre solution consisterait à privilégier une approche progressive, en ciblant d’abord les axes prioritaires avec des solutions réalistes. Plutôt que de viser un « zéro trou » utopique, les autorités pourraient lancer un programme d’entretien régulier des routes, avec des opérations de réhabilitation saisonnières pour minimiser les dégâts causés par les intempéries.
Cette approche serait plus crédible et permettrait d’instaurer une confiance entre la population et les dirigeants.
En outre, la sensibilisation de la population sur la gestion des voiries urbaines est essentielle. L’urbanisme participatif, où les citoyens sont impliqués dans l’entretien de leur environnement immédiat, pourrait jouer un rôle clé dans la durabilité des infrastructures.
Des campagnes éducatives sur la gestion des déchets et l’impact de l’érosion urbaine aideraient également à réduire la détérioration rapide des routes.
Pour que l’information sur l’état des routes du Kasaï-Central ne soit plus une source de frustration mais un levier de changement, les autorités doivent modifier leur approche.
Plutôt que d’utiliser des projets fictifs à des fins électoralistes, elles devraient s’engager dans une gouvernance basée sur la transparence et l’efficacité. Les médias locaux ont aussi un rôle crucial à jouer en dénonçant les abus et en exigeant des comptes auprès des responsables.
Le projet « Zéro Trou » est à la croisée des chemins. Il peut soit rester un énième mirage politique, soit se transformer en une opportunité de développement si une volonté réelle d’action s’installe.
Il appartient aux dirigeants du Kasaï-Central de choisir entre l’illusion et la responsabilité. La population, elle, a déjà fait son choix : elle veut des routes, pas des discours.
Nestor Ilo