La grossesse est souvent perçue comme une épreuve exclusivement féminine. Pourtant, en République Démocratique du Congo, les hommes vivent également cette période de manière intense, mais souvent en silence. Leur souffrance, bien que différente de celle des femmes, mérite d’être reconnue.
Une pression économique et sociale écrasante
En RDC, l’homme est traditionnellement vu comme le principal pourvoyeur financier. Lors de la grossesse de sa compagne, il doit non seulement subvenir à ses besoins alimentaires et médicaux, mais aussi préparer l’arrivée de l’enfant. Cette pression peut être accablante, surtout dans un contexte économique difficile.
Le poids de l’incertitude sanitaire
La RDC présente l’un des taux de mortalité maternelle les plus élevés au monde. En 2022, le pays a enregistré 6 995 décès maternels, avec un taux de mortalité maternelle estimé à 547 pour 100 000 naissances vivantes en 2020. Cette réalité plonge les hommes dans une angoisse constante concernant la santé de leur compagne et de leur futur enfant.
Témoignages locaux : des voix d’hommes à travers la RDC
Jean-Pierre, 34 ans, père de deux enfants à Goma, témoigne :
“Quand ma femme est tombée enceinte de notre troisième enfant, j’ai ressenti une pression énorme. Je devais m’assurer que tout allait bien, que nous avions les moyens pour les soins médicaux, et en même temps, je devais rester fort pour elle. C’était épuisant, mais je n’avais personne à qui en parler.”
Michel, 28 ans, père à Lubumbashi, ajoute :
“La grossesse de ma femme a été difficile. Elle a eu des complications, et j’étais constamment inquiet. Mais dans notre culture, les hommes ne montrent pas leurs émotions. J’ai dû tout garder pour moi.”
Les femmes reconnaissent la souffrance des hommes
Marie, 45 ans, mère de quatre enfants à Kisangani, déclare :
“Je vois mon mari se lever tôt chaque matin pour travailler dur, puis revenir le soir, fatigué, mais toujours prêt à m’écouter et à m’aider. Il porte aussi un fardeau, même s’il ne le montre pas.”
Élisabeth, 38 ans, mère à Bukavu, ajoute :
“Lors de ma dernière grossesse, mon mari a pris des congés pour m’accompagner à toutes les consultations prénatales. Il était plus anxieux que moi, et cela m’a réconfortée.”
Des perceptions divergentes : quand certains pensent que les hommes ne souffrent pas
Joséphine, 30 ans, mère à Mbandaka, dit :
“Pour moi, les hommes sont là juste pour engrosser leurs femmes. Après, ils passent leur temps à boire de la bière, sans penser à l’avenir de l’enfant ni à ce que la femme traverse.”
Antoinette, 27 ans, de Goma, partage un avis similaire :
“Je ne crois pas que les hommes souffrent pendant la grossesse. Ils profitent simplement de la situation, sans se soucier des responsabilités qui viennent avec un bébé.”
Ces témoignages montrent qu’il existe des perceptions très différentes sur le rôle et la souffrance des hommes pendant la grossesse, souvent influencées par des expériences personnelles ou des normes culturelles.
Le silence culturel : un frein à l’expression des émotions masculines
Dans la société congolaise, il existe une norme culturelle qui valorise la force et la stoïcité chez les hommes. Exprimer des émotions ou des inquiétudes est souvent perçu comme un signe de faiblesse. Cette stigmatisation empêche de nombreux hommes de partager leurs peurs et leurs souffrances liées à la grossesse de leur compagne.
Vers une reconnaissance et un soutien pour les futurs pères
Il est essentiel de briser ce silence et de reconnaître que la grossesse est une expérience qui engage le couple tout entier, physiquement, émotionnellement, et socialement. Les hommes doivent être inclus dans les soins prénataux, écoutés, informés, et soutenus.
Des associations locales à travers la RDC commencent à sensibiliser sur ce sujet, encourageant les pères à s’exprimer, à accompagner leurs compagnes, et à partager leurs expériences.
La souffrance des hommes pendant la grossesse de leurs compagnes est une réalité souvent ignorée. En RDC, il est crucial de reconnaître et de soutenir les hommes dans cette période. En brisant le silence et en favorisant le dialogue, nous pouvons créer une société plus compréhensive et solidaire pour tous.
Pour Zionnews-tv.net / Jason Kabera