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À Goma, le phénomène “Kurendera” inquiète : quand l’amour précoce devient une porte vers la désolation

by Zionnews
Dans les rues de Goma, le phénomène appelé “kurendera” — littéralement “suivre un garçon” ou “happer” s’impose de plus en plus dans la vie des jeunes filles.

Dans les rues de Goma, le phénomène appelé “kurendera”  littéralement “suivre un garçon” ou “happer” — s’impose de plus en plus dans la vie des jeunes filles. Ce comportement, perçu par certains comme un simple jeu d’amour, devient une véritable crise sociale, surtout dans les quartiers populaires où les valeurs familiales sont encore très ancrées.

Sur le terrain : des histoires poignantes

Au marché Virunga, Aline (17 ans) raconte avec pudeur :

« J’aimais un garçon, il m’a promis de m’épouser… Après avoir dormi avec lui, mes parents l’ont appris. On m’a dit que je ne pouvais plus vivre à la maison car ‘kuku ikelala inje, inageuka kwale’. »

Cette expression populaire « une poule qui dort dehors devient une pintade » symbolise une croyance profondément ancrée : une fille qui a couché hors mariage perd toute pureté et ne mérite plus de rester dans sa famille.

Mais derrière ces traditions, se cache une réalité amère : plusieurs jeunes filles se retrouvent sans abri, livrées à elles-mêmes, parfois contraintes à la prostitution ou aux mariages forcés.

Les causes profondes

Des sociologues interrogés à l’Université de Goma estiment que le phénomène “kurendera” découle de plusieurs facteurs :

– Le manque de dialogue entre parents et enfants ;

– La pauvreté qui pousse certaines filles à chercher un soutien matériel ;

– L’influence des réseaux sociaux et des séries romantiques ;

– L’absence d’éducation sexuelle dans les écoles.

Le Chef des Travaux Germain BAHATI, sociologue et psychologue social, souligne :

« Le problème n’est pas seulement moral, il est structurel. Les jeunes filles manquent d’écoute, les parents manquent de temps, et la société manque d’alternatives pour canaliser les émotions des adolescents. »

Témoignages croisés

Un jeune homme rencontré au quartier Ndosho confie :

« Chez nous, quand une fille vient passer la nuit, le lendemain, ses parents la renient. Donc, elle reste avec toi même si tu n’as rien à lui offrir. C’est comme ça que plusieurs mariages précoces commencent. »

Pendant ce temps, certaines mères de famille reconnaissent aussi leur part de responsabilité :

« Avant, on parlait aux enfants, maintenant on a peur d’eux. Pourtant, c’est nous qui devrions leur montrer la voie. »

Un cri d’alarme pour les autorités et les éducateurs

Les associations de défense des droits de la femme tirent la sonnette d’alarme : le phénomène “kurendera” favorise la déscolarisation, les grossesses précoces et la pauvreté féminine.
Elles appellent à des campagnes de sensibilisation dans les écoles et les églises pour encourager le dialogue, la prévention et la réinsertion des jeunes filles rejetées par leurs familles.

Ce phénomène n’est pas qu’une question de mœurs, mais un miroir des fractures sociales qui minent la jeunesse congolaise.
Il est urgent de repenser l’éducation, de briser les tabous et de créer un environnement où l’erreur ne condamne pas à la misère, mais devient une occasion de reconstruction.

Pour Zionnews-tv.net/Jason Kabera

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