Après une longue période de silence, l’ancien président Joseph Kabila semble reprendre l’initiative politique en convoquant une rencontre avec des leaders de l’opposition à Nairobi, au Kenya.
Si cette révélation reste pour l’instant non confirmée officiellement, elle suscite déjà débats, spéculations et inquiétudes au sein du paysage politique congolais.
1. Le retour politique : calcul ou opportunité ?
Depuis la fin de son mandat en 2019, Joseph Kabila avait largement réduit ses apparitions publiques, se cantonnant souvent dans l’ombre politiquement. Des observateurs l’avaient qualifié de retraité politique. Cependant, des signes de repositionnement avaient été observés depuis 2025, évoquant un retour progressif à la scène nationale.
dehors de la RDC, Nairobi procure un terrain neutre, moins exposé aux contraintes locales de sécurité ou de surveillance. Ce choix témoigne d’une stratégie mesurée, visant à rassembler des forces d’opposition dans un environnement contrôlé.
2. Les protagonistes absents : Katumbi, Fayulu, Kabund, Sesanga ?
Selon le média Jeune Afrique, des figures majeures de l’opposition Moïse Katumbi, Martin Fayulu, Jean-Marc Kabund, Freddy Matungulu, Denis Kadima, ou Leonard She Okitundu ne seraient pas présents parmi les participants de Nairobi. Ces absences peuvent s’expliquer pour plusieurs raisons :
– Souveraineté politique : certains leaders préfèrent travailler dans un cadre domestique, pour ne pas paraître alignés avec un ancien président controversé.
– Méfiance et rivalités historiques : des tensions internes ou des divergences stratégiques peuvent dissuader la participation.
– Logistique ou sécurité : des contraintes de déplacement ou des craintes sécuritaires peuvent limiter leur engagement.
Ces absences fragilisent la portée du conclave : sans une représentation large, la réunion pourrait être perçue comme un rassemblement restreint plutôt qu’un véritable regroupement national.
3. Enjeux et motivations possibles
a) Médiation politique
Kabila pourrait jouer un rôle de médiateur ou de facilitateur entre factions de l’opposition. Sa stature historique lui confère un poids symbolique qui pourrait contribuer à réconcilier des tendances discordantes.
b) Pression sur le pouvoir en place
Ce retour discret pourrait servir de signal au gouvernement en place : celui qui fut longtemps maître de la scène politique veut rester influent. Il pourrait chercher à imposer des conditions ou rapprocher des agendas de transition.
c) Relance de crédibilité
Revenir en meneur politique donnerait à Kabila une présence plus active, et potentiellement une légitimité renouvelée dans certains cercles, surtout s’il parvient à générer un consensus.
d) Rapprochement avec des forces de l’Est
Étant donné les tensions accrues avec le mouvement rebelle M23 et les accusations de collusion, ce retour pourrait intervenir dans un contexte où la question de l’Est de la RDC est au cœur du débat. Le gouvernement actuel a accusé Kabila de soutenir indirectement la rébellion.
4. Risques, critiques et réactions prévisibles
– Accusations de manipulation : certains pourraient voir ce conclave comme un coup d’influence ou un stratagème de reconquête du pouvoir.
– Division interne à l’opposition : l’absence de certains leaders majeurs pourrait creuser les fractures et intensifier les méfiances.
– Réactions du pouvoir : le gouvernement peut chercher à décrédibiliser l’initiative ou à entraver sa tenue.
– Surveillance sécuritaire : l’organisation d’une réunion politique de cette ampleur exige une certaine discrétion — tout lancement prématuré dans les médias expose ses acteurs à des risques de perturbation.
5. Scénarios possibles à venir
– Scénario optimiste : la réunion aboutit à un plateau d’actions communes, des lignes de coordination, peut-être la mise en place d’un front unifié avec des revendications convergentes.
– Scénario de transition : le conclave sert de rampe de lancement pour une overture concertée à la négociation avec le pouvoir, notamment autour des questions sécuritaires et constitutionnelles.
– Scénario de division : sans consensus, la réunion pourrait renforcer les divisions, marginaliser Kabila ou l’opposition, voire provoquer des conflits internes.
L’initiative de Nairobi, si elle se confirme, marque un tournant potentiellement majeur dans l’évolution politique de la RDC. Le retour discret mais calculé de Joseph Kabila dans le jeu de l’opposition, avec l’ébauche d’un regroupement à l’étranger, démontre que les équilibres du pouvoir ne sont jamais figés.
Mais pour que ce retour soit crédible, il lui faudra dépasser le symbolisme et générer des résultats concrets, surtout dans une opposition fragmentée et un paysage politique hautement polarisé.
LA REDACTION
