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Réforme contestée : pourquoi les élèves s’inquiètent de l’oral d’anglais à l’Exetat 2026 et ce que le ministère doit revoir

by Zionnews
Le ministère de l’Éducation nationale et de la Nouvelle Citoyenneté a décidé d’introduire, dès l’édition 2026 de l’Examen d’État, une épreuve orale d’anglais obligatoire pour les finalistes des sections des sciences humaines.

Le ministère de l’Éducation nationale et de la Nouvelle Citoyenneté a décidé d’introduire, dès l’édition 2026 de l’Examen d’État, une épreuve orale d’anglais obligatoire pour les finalistes des sections des sciences humaines.

  • L’inspecteur général Hubert Kimbonza Sefu a adressé une note aux inspecteurs provinciaux pour organiser cette épreuve.

  • Le jury d’anglais aura la même structure que celui de l’oral de français, avec une pondération identique.

  • Cette réforme s’inscrit dans la loi-cadre n° 14/004 du 11 février 2014, visant notamment à former des « élites » prêtes à s’adapter à un monde globalisé.

Le ministère présente l’initiative comme une mesure d’ouverture : maîtriser l’anglais, selon lui, renforcera la compétitivité des élèves et leur insertion dans l’enseignement supérieur et le marché professionnel.
Lors d’une séance de travail, l’Inspecteur général a encouragé les professeurs d’anglais à adopter une approche par compétences, en insistant beaucoup plus sur l’oral que sur la simple théorie.

2. Les critiques et les désaccords des élèves

Malgré les intentions affichées, plusieurs élèves expriment des réserves importantes face à cette réforme :

a) Manque de pratique orale

  • Selon certains finalistes, leurs cours d’anglais actuels sont très peu orientés vers la pratique orale. Une élève, Nienie Walme Winner (école d’application de l’UPN), déclare qu’elle « a du mal à comprendre et à m’exprimer en anglais » à l’oral, car l’enseignement reste très écrit.

  • Le manque de temps et de ressources pendant les cours rend difficile une pratique individuelle “face à face” avec l’enseignant.

b) Inégalité dans la préparation

  • Certains élèves rapportent que dans certaines écoles (par exemple à l’Institut d’enseignement médical de Selembao), il n’y a pas de cours d’anglais dans leur programme, ce qui les laisse très mal préparés pour l’oral.

  • D’autres craignent des différences d’opportunité selon les établissements : sans ressources pédagogiques suffisantes, certaines écoles risquent d’être défavorisées. Cela peut créer des disparités dans la réussite à l’oral.

c) Peur de l’examen

  • Plusieurs élèves disent redouter l’épreuve : “la peur de ne pas être à la hauteur est un réel défi,” affirme une candidate.

  • Le fait que l’évaluation orale soit confiée à un jury peut rendre l’exercice plus stressant, surtout pour des élèves peu habitués à s’exprimer en anglais.

d) Problèmes pédagogiques

  • Selon des enseignants et des directeurs d’écoles, le programme national d’anglais ne prévoit pas suffisamment d’espaces pour le développement de compétences conversationnelles.

  • Des voix demandent une révision du programme d’anglais pour y intégrer davantage d’oral, mais aussi la mise en place d’activités comme des « journées anglophones » pour habituer les élèves à parler régulièrement en anglais.

  • Certains proposent aussi une formation plus poussée des enseignants d’anglais pour qu’ils soient réellement capables de préparer leurs élèves à une épreuve orale.

3. Pourquoi ces critiques sont légitimes : les risques de la réforme telle que conçue

À la lumière des inquiétudes exprimées, plusieurs risques structuraux apparaissent si le ministère ne revoit pas son plan :

  1. Inégalité d’accès et de préparation

    • Si certaines écoles n’enseignent pas ou très peu l’anglais, leurs élèves seront désavantagés.

    • Sans ressources didactiques suffisantes (manuels, formateurs, supports audio/orale), l’épreuve orale risque de pénaliser les élèves des milieux défavorisés.

  2. Stress et pression sur les élèves

    • L’oral est un format plus exigeant sur le plan psychologique : il nécessite non seulement la maîtrise linguistique, mais aussi la confiance en soi, la prononciation, la compréhension orale.

    • L’absence d’une transition progressive (par exemple via des évaluations orales antérieures) pourrait augmenter l’échec ou l’échec perçu.

  3. Formation insuffisante des enseignants

    • Le ministère demande déjà aux enseignants de repenser leur méthodologie, mais s’il n’y a pas des formations de qualité, certains enseignants risquent de ne pas réussir à transmettre l’anglais oral efficacement.

    • Des enseignants mal préparés pourraient se contenter d’un enseignement superficiel ou théorique, ce qui ne prépare pas les élèves à un vrai entretien oral.

  4. Déconnexion entre réforme et réalité : un décalage trop important

    • Imposer une épreuve orale sans s’assurer que l’ensemble du système est prêt (enseignants, matériel, cursus) peut créer un “choc” pour les élèves.

    • Le calendrier de mise en œuvre peut être trop serré : les élèves de la session 2026 pourraient ne pas avoir bénéficié d’un renforcement suffisant.

4. Recommandations : comment le ministère devrait revoir son plan

Pour rendre cette réforme viable, équitable et réellement bénéfique, voici quelques pistes que le ministère pourrait envisager :

  1. Phase préparatoire avant l’édition 2026

    • Mettre en place un programme pilote dans certaines écoles (par ex. un échantillon représentatif) pour tester l’oral d’anglais, identifier les difficultés, ajuster les méthodes avant un déploiement national.

    • Organiser des “ateliers d’oral anglais” pour finalistes dès maintenant : des simulations, des répétitions avec des jurys fictifs.

  2. Renforcer la formation des enseignants

    • Offrir des sessions de formation intensive aux professeurs d’anglais, centrées sur l’approche par compétences, la pédagogie de l’oral, la gestion d’un jury, l’évaluation orale.

    • Fournir des ressources (manuels, enregistrements, guides de pratique orale) pour que les enseignants puissent construire des leçons d’oral efficaces.

  3. Réviser le programme d’anglais

    • Adapter le curriculum national pour intégrer des compétences orales dès les cycles antérieurs, pas seulement au secondaire.

    • Encourager les écoles à instaurer des “clubs anglais”, des “journées anglophones” ou des activités extrascolaires axées sur la conversation, pour habituer les élèves à parler anglais.

  4. Assurer l’équité

    • Fournir du matériel (audio, supports de conversation) aux écoles faibles en ressources.

    • Garantir que tous les finalistes auront la possibilité de s’entraîner à l’oral, y compris dans les zones rurales ou défavorisées.

  5. Mécanisme d’évaluation et de feedback

    • Après la première session avec l’oral (2026), mener une évaluation (statistiques de réussite, retours d’élèves, de professeurs, de jurys) pour ajuster la réforme.

    • Mettre en place un système de retours (feedback) pour les candidats : que chaque élève connaisse ses faiblesses (prononciation, fluidité, compréhension) afin de s’améliorer.

L’initiative d’introduire un oral d’anglais à l’Examen d’État est ambitieuse et peut constituer un tournant positif pour l’éducation congolaise : elle favorise la maîtrise d’une langue internationale, prépare les élèves à des études supérieures et au monde professionnel globalisé.

Toutefois, les préoccupations des élèves sont réelles et légitimes. Sans une préparation rigoureuse, sans un soutien pédagogique suffisant et sans un accompagnement équitable, cette réforme pourrait creuser les inégalités et générer de la frustration plutôt que de l’émancipation linguistique.

Le ministère doit donc revoir son plan en adoptant une stratégie graduelle, inclusive et bien accompagnée. Une réforme réussie n’est pas seulement celle qui existe sur le papier, mais celle qui fonctionne dans tous les lycées, dans toutes les provinces, et pour tous les élèves.

LA REDACTION

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